La théorie de l'attachement
Stéphanie BEYELER
La théorie de l'attachement est née dans un contexte bien particulier : celui de l'étude des conséquences de la séparation de l'enfantet de sa mère d'une part, et des carences affectives mises en lumière par R. SPITZ après la seconde guerre mondiale d'autre part.
En 1959, J. BOWLBY démontre que le besoin primordial du jeune enfant est la création d'un lien stable et sécurisant avec une figure maternelle répondant à ses besoins. J. BOWLBY propose le terme d’attachement pour désigner le lien particulier unissant l’enfant à la figure maternelle.
Contrairement à Freud, qui soutenait que le nourrisson s’attache à sa mère parce qu’elle satisfait son besoin d’alimentation, J. BOWLBY invoque le besoin de contacts sociaux. L’enfant naît social et se construit au moyen des relations avec les personnes significatives qui l’entourent. Il se sent plus ou moins en sécurité en fonction de la réponse apportée à ses besoins.
D’après J. BOWLBY, l’attachement est un processus instinctif destiné à assurer la survie de l’espèce en maintenant une proximité entre le nourrisson et sa mère. L’attachement débute dès la grossesse et s’établit dans les trois premières années de la vie. Il va influencer la façon dont l’enfant va ensuite établir ses relations intimes et sociales pour le reste de sa vie. Le but de l’attachement est que l’enfant se sente en sécurité, protégé et confiant. Le bébé a la capacité de former des liens d’attachement avec plusieurs individus mais il va se lier davantage à une personne en particulier (le plus souvent la mère), et c’est ce qui aura le plus d’influence sur lui.
Il s'agit d'un processus réciproque, nécessitant des interactions entre l’enfant et la figure d’attachement. La proximité est nécessaire et le bébé a des comportements qui vont la favoriser : pleurs, contact visuel, sourire… La qualité de l’attachement va dépendre de la rapidité et de la façon dont le parent va répondre aux signaux de l’enfant.
Enfin, le système d’attachement est activé par le stress : peur, douleur, maladie, séparation ou crainte de séparation.
Le modèle interne de représentation et les conséquences
A force de constater la façon dont la figure d’attachement répond à ses besoins de sécurité, le bébé développe un modèle interne lui permettant d’anticiper les interactions futures. Un parent suffisamment bon, disponible, avec des attitudes constantes, sera perçu comme une figure d’attachement fiable. Avec cette « base de sécurité », l’enfant pourra se relaxer et explorer son environnement. Il se considérera lui-même comme aimable et méritant de l’affection. Avec le temps, les enfants avec attachement sécurisant seront plus compétents dans la résolution de problèmes et dans les relations avec les pairs. Ils sont plus curieux, moins anxieux, moins hostiles et ont une meilleure estime de soi.
Par contre, si l’attachement ne se fait pas d’une façon appropriée (en raison d’une figure d’attachement absente ou inadéquate durant la prime enfance), l’enfant pourra voir le monde comme dangereux et se considérer comme indigne d’amour. A long terme, les enfants avec un attachement insécurisant ont davantage de problèmes dans leur fonctionnement émotionnel, social et cognitif.
Une fois le modèle de représentation établi, il devient difficile de le changer. Des études ont montré un taux de concordance de 70% entre le type d’attachement à l’âge d’un an et à l’âge adulte. De plus, le modèle tend à se reproduire d’une génération à l’autre.
Les différents types d’attachement
La méthode de recherche la plus répandue pour évaluer la qualité de l’attachement entre l’enfant et sa mère a été développée par M. AINSWORTH en 1978. Initialement, elle a créé cette procédure pour observer comment les enfants de 12 à 18 mois utilisaient leur mère comme base de sécurité dans une situation anxiogène. La procédure comporte huit épisodes, structurés de façon à générer chez l’enfant un niveau d’anxiété croissant. Cette évaluation standardisée, appelée « situation étrange », dure environ 20 minutes. On demande au parent de sortir de la salle à deux reprises pendant quelques minutes et le comportement de l’enfant est alors observé.
Selon les réponses des enfants à la « situation étrange », M. AINSWORTH identifie trois modèles d’attachement ; chaque modèle est associé à la façon plus ou moins sensible, plus ou moins appropriée et rapide avec laquelle la figure d’attachement répond aux signaux de détresse de son bébé :
- Le modèle d’attachement sécurisant, résulte d’une disponibilité de la figure maternelle et surtout d’une sensibilité aux signaux de son enfant ;
- Le modèle d’attachement de type anxieux-ambivalent semble associé à une incohérence des réponses maternelles alternant entre la disponibilité et le rejet ;
- Le modèle d’attachement de type anxieux-évitant serait lié à des interactions intrusives ou rejetantes de la part de la mère, surtout lorsque l’enfant présente une vulnérabilité émotionnelle.